Une carrière de 64 ans mais à quel prix? Les tristes confessions du chanteur Abdoulaye Saoupith Camara « Bras Cassé »
Abdoulaye Saoupith, connu sous le nom de Bras Cassé, est une figure incontournable de la musique guinéenne et auteur de sept albums. À 77 ans, cet artiste, auteur-compositeur qui a débuté sa carrière en 1961, porte le poids de décennies de création musicale et de service à son pays.
Malgré des succès de ses œuvres telles que « Kondo boè » , « Fatou Tassana » , ou encore « An loubé » , Bras Cassé confie tirer de nos jours, le diable par sa queue.
Avec des chansons qui ont marqué des générations, y compris le titre « A bamba fakhi » enregistré lors de la campagne de l’ancien Président Alpha Condé, Bras Cassé est un artiste prolifique. Pourtant, il déplore le manque de reconnaissance financière pour son travail. « Je n’ai jamais eu de salaire. Même dans mes moments de gloire », confie-t-il avec amertume. Il révèle que les droits d’auteur qu’il perçoit ne dépassent pas 1.800.000 GNF, une somme dérisoire pour quelqu’un qui a tant apporté à la culture guinéenne.
Pour Bras Cassé, cette situation est le fruit d’une mauvaise gestion et d’un manque de respect envers les artistes au Bureau Guinéen des Droits d’Auteurs (BGDA). « Normalement, c’est chaque six mois ou par trimestre qu’on doit verser le montant parce qu’on a beaucoup travaillé pour ce pays. La Guinée ne finira jamais de nous payer », souligne-t-il avec désillusion.
Malgré son titre de Chancelier de l’ordre national du mérite , attribué par le président Mamadi Doumbouya, Bras Cassé estime qu’il vit dans des conditions précaires. « J’ai servi six chefs d’État : Sékou Touré, Lansana Conté, Dadis Camara, Sékouba Konaté, Alpha Condé. Maintenant, je suis Mamadi Doumbouya. Je n’ai pas été battu, je n’ai pas été blessé. Normalement, je ne dois pas demander aujourd’hui de me donner quelque chose à manger », se désole-t-il.
L’artiste raconte avec douleur les difficultés auxquelles il fait face, y compris une maladie qu’il peine à soigner malgré son passeport de santé. « J’ai appelé quelques responsables pour me venir au secours, car c’est compliqué », ajoute-t-il, rappelant à quel point la reconnaissance symbolique qu’il a reçue reste déconnectée de ses besoins matériels.
Au-delà des critiques qu’il adresse au système, Bras Cassé exprime un regret plus personnel et poignant. « Je me fâche contre ma personne. Parce que c’est ma personne qui ai décidé d’être artiste », avoue-t-il avec une tristesse contenue dans les colonnes de nos confrères d’africaguinee.com.
L’histoire de Bras Cassé est celle de nombreux artistes guinéens, dont le talent et la contribution ne sont pas suffisamment valorisés. Elle met en lumière la nécessité d’un véritable soutien institutionnel pour ceux qui ont consacré leur vie à enrichir le patrimoine culturel de leur pays, une action déjà en cours avec les nouvelles autorités.
En attendant, l’artiste continue de porter sa douleur avec dignité, tout en espérant un changement pour les générations futures.
A.C